Intégrer la biodiversité au développement : leçons du projet « BIODEV2030 »

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Dans le cadre du projet « BIODEV2030 » mis en œuvre sur financement de l’AFD, Expertise Franceaccompagne les gouvernements de 16 pays à intégrer la biodiversité dans les secteurs d’activités économiques les plus impactants. A l’occasion du « One Forest Summit » organisé à Libreville (Gabon), cet article présente le bilan de ce projet et notamment qu’il a permis de développer. Les résultats et les leçons tirés de 3 ans de mise en œuvre seront présentées le 22 mars lors d’un webinaire qui permettra d’échanger avec les acteurs ayant expérimenté cette approche.

 

La santé des écosystèmes dont nous dépendons et dont dépendent toutes les autres espèces se dégrade aujourd’hui à une vitesse sans précédent. Selon le dernier rapport de l’IPBES (le GIEC de la biodiversité), les trajectoires actuelles ne permettent pas d’atteindre les objectifs de conservation et d’exploitation durable de la nature. Au-delà d’affaiblir les moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie à travers le monde, cette situation entraîne également des risques économiques et financiers. La biodiversité doit être intégrée dans chaque processus décisionnel et chaque secteur d’activité qui contribuent, directement ou indirectement, à son érosion. Des changements profonds, notamment sur le plan économique, sont nécessaires.

Le projet « BIODEV2030 » est financé par l’AFD, coordonné par Expertise France et mis en œuvre par l’UICN et le WWF-France dans 16 pays d’Afrique, d’Amérique du Sud et d’Asie qui connaissent des contextes économiques, sociaux, politiques différents et où les caractéristiques de la biodiversité et les menaces qui pèsent sur elle ne sont pas homogènes. Néanmoins, tous ces pays ont des économies en développement dont une part importante du PIB est issue des secteurs primaires (plus de 20% en moyenne dans les 16 pays), responsables des impacts les plus importants sur la biodiversité.

De 2019 à 2022, ces pays ont expérimenté la méthode BIODEV2030 d’intégration de la biodiversité dans au moins deux secteurs économiques identifiés comme prioritaires pour la biodiversité et le développement du pays. Cette méthode repose sur un dialogue associant tous les acteurs de la société à travers des plateformes multi-acteurs. L’objectif est de faire émerger des engagements sectoriels volontaires de réduction des pressions sur la biodiversité qui s’appuient sur des éléments scientifiquement fondés.

Rantonirina Rakotoaridera, point focal de la convention sur la diversité biologique de Madagascar, explique : « Grâce à BIODEV2030, la biodiversité vient irriguer les secteurs économiques ne serait-ce qu’en objectivant les pressions des secteurs. C’est nécessaire pour engager le dialogue. »

Ainsi au Vietnam, les entreprises de plantations forestières se sont engagées à ne plus empiéter sur les forêts naturelles mais aussi à se convertir en plantation forestière avec des certifications de durabilité (type FSC) et à planter des forêts de gros bois à long cycle pour mieux protéger les écosystèmes.

 

 

Les points forts de la méthode BIODEV2030

L’application de la méthode BIODEV2030 permet de prioriser les actions à mener en fonction des contextes socio-économiques et environnementaux. Sur la base d’une évaluation scientifique de l’état de la biodiversité, les parties prenantes de chaque pays ont sélectionné  des filières d’activités à engager. Une seconde analyse détaillée des filières choisies a permis de décrire leurs caractéristiques socio-économiques, politiques et environnementales et d’identifier les pratiques productives ayant un impact négatif et positif sur la biodiversité. Ces données sont venues alimenter les échanges entre parties prenantes pour définir une série d’actions à mettre en œuvre par les acteurs du privé (ainsi que des mesures accompagnatrices relevant de la responsabilité de l’Etat ou d’institutions financières) afin de diminuer leurs pressions sur la biodiversité.

La force de cette méthode réside dans la création et l’animation de plateformes de dialogue qui sont des espace d’échanges entre acteurs du privé représentants des secteurs d’activités économiques (agriculture, foresterie, pêche, …), acteurs du public (ministère de l’environnement et ministères sectoriels notamment) et société civile (associations, communautés locales). Ces plateformes ont permis ont permis de sensibiliser l’ensemble des acteurs sur la biodiversité, et de mener une réflexion collective sur les changements de pratiques à opérer.

Un projet propice à la capitalisation d’expériences

Le caractère pilote de BIODEV2030 en fait un projet propice à la capitalisation d’expériences. Cette capitalisation autour de la méthode BIODEV2030 a été menée avec l’ambition qu’elle nourrisse les réflexions et donne les clés de réussites à d’autres porteurs de projets ou institutions qui souhaiteraient développer une démarche similaire d’intégration de la biodiversité.

Les enseignements sont présentés dans une collection de guides pratiques. Ils sont pensés pour accompagner pas à pas les porteurs de projets dans la mise en œuvre de chaque composante de la méthode BIODEV2030 en détaillant les étapes à respecter mais aussi et surtout en émettant un certain nombre de recommandations.

Les témoignages directs des points focaux nationaux pour la biodiversité, des acteurs du privé et de représentants du secteur financiers qui ont participé au dialogue multi-acteurs viennent illustrer la réalité des bénéfices retirés par les parties prenantes. 

 « Au cours des ateliers [de dialogue], on a compris qu’on peut, si on est conscient, tenir compte et faire attention [à la biodiversité] lorsque nous exploitons. Et ça, c’est à travers des « diamètres d’exploitabilité ». Il faut les respecter, il ne faut pas détruire les arbres d’avenir quand tu as besoin de bois. Tu détruis, tu fais de la déforestation abusive. » Bertin Akouta, représentant de la fédération des acteurs économiques de la filière bois & forêt au Bénin.

 « On a vu BIODEV2030 comme une opportunité. On a sauté dessus ! Nous apprécions beaucoup ce projet car il permet de décloisonner les acteurs et secteurs et de permettre leur dialogue. Il permet l’unification, le regroupement d’acteurs, de les informer et de s’organiser ensemble pour agir et conserver la biodiversité». Mr. Amadé Ouedraogo, point focal CDB du Burkina Faso.

« Il y a un espoir derrière ce projet car il se donne les moyens d'engager les acteurs à tous les niveaux dans tous les secteurs pour que chacun à son niveau, qu'il soit acteur direct ou indirect puisse avoir comme boussole l'engagement dans la préservation et la gestion durable de la biodiversité. » Mikaelou Dicko - Chargé de projet de l'Association pour la promotion de l'élevage au Sahel et en Savane

 

 Pour en savoir plus, consulter le site du projet et la fiche projet.

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