Les aires marines des territoires insulaires, au cœur des enjeux de préservation des océans
Érosion de la biodiversité, pollution plastique, surexploitation des ressources halieutiques, montée des eaux et acidification des océans ne sont plus de simples alertes scientifiques, mais des urgences géopolitiques qui exigent des réponses coordonnées. Les experts internationaux estiment que 40% des écosystèmes marins sont fortement dégradés sur la planète. L’UNOC ambitionne ainsi, à l’image d’une COP centrée sur les océans, de faire naître une véritable gouvernance internationale plus ambitieuse et inclusive des espaces maritimes. Face aux intérêts économiques divergents et aux inégalités d’accès aux ressources, la coopération internationale est appelée à se réinventer pour que les océans demeurent un bien commun mondial, au cœur des équilibres écologiques et du développement durable.
Dans l’Océan Indien, un vaste programme régional pour conserver la biodiversité insulaire
Structurer des réseaux régionaux et un dialogue multi-acteurs pour préserver la biodiversité
Pour répondre à l’urgence de la perte de biodiversité dans un des « hotspots » les plus riches et menacés de la planète, le programme VARUNA, une initiative régionale de 10 millions d’euros, financée par l’Agence française de développement (AFD) et mise en œuvre par Expertise France depuis janvier 2022, vise à accompagner les îles du sud-ouest de l’océan Indien, à savoir l’Union des Comores, Madagascar, Maurice, les Seychelles, Mayotte et La Réunion (France),dans la préservation de leurs milieux naturels.
L’objectif général du programme est de structurer des réseaux d’acteurs régionaux, pour encourager des efforts coordonnés et une gestion durable de la biodiversité, soutenir l’intégration des enjeux de transition écologique auprès des acteurs économiques, notamment via le dialogue public-privé et l’engagement des entreprises, et encourager la contribution de la recherche aux dialogues science-société, pour diffuser les connaissances et renforcer l’appropriation des enjeux par les citoyens et les décideurs.
En 2025, 17 projets pilotes impliquent dans les six territoires de la zone divers acteurs : ONGs, gestionnaires d’aires protégées, entreprises privés ou établissements publics et instituts de recherche. Le programme met ainsi en réseau plus de 80 institutions (scientifiques, publiques, privées, associatives) à travers des rencontres, ateliers, et productions communes.
Varuna joue à ce égard un rôle d’ensemblier : en créant des ponts entre îles, institutions, savoirs, et générations, pour que la coopération environnementale devienne un levier structurant du développement durable régional.
Renforcer les acteurs locaux dans la protection et la valorisation de leur patrimoine maritime
Les réseaux régionaux d’acteurs publiques, économiques et scientifiques des îles de l’océan Indien jouent un rôle central dans la sensibilisation et la conservation de la biodiversité locale. Le programme Varuna, en accompagnant le renforcement et l’animation de ces réseaux, et le dialogue entre secteurs privé, publique, scientifique et la société civile soutient cette dynamique.
L’ambition du programme est claire : mettre la biodiversité au cœur des décisions régionales. Cela suppose de renforcer les liens entre territoires, de valoriser les connaissances locales, de mobiliser tous les secteurs — y compris économiques — et de permettre aux populations locales d’être actrices de la transition écologique.
VARUNA ne se limite pas à financer des projets ; il structure une dynamique collective et installe les conditions d’une gouvernance environnementale multi-acteurs régionale, inclusive et durable.
- Par exemple, le projet « Réseau des gestionnaires d’Aires Marines Protégées » (AMP), mis en œuvre par Réserves naturelles de France dans le cadre du programme VARUNA, appuie un réseau régional de plus de 71 professionnels de la Nature (gardes, conservateurs, animateurs, etc.), qui interviennent au sein de réserves naturelles couvrant plus de 100 000km2 et animent une formidable communauté de pratiques insulaire. Ces synergies se font ainsi à un niveau local en entre autres via des actions de formation, ou de compagnonnage qui garantissent une intégration plus durable des bonnes pratiques. Celles-ci permettent notamment aux gestionnaires d’AMP de faire face plus efficacement aux nombreuses menaces rencontrées par les écosystèmes marins, comme la pêche illégale, les pollutions d’origine terrestre, et les pressions anthropiques croissantes.
- Varuna soutient également la prise en compte de la biodiversité par les acteurs du secteur privé et du tissu économique régional et local. A travers son Fonds Business&Biodiversité de l’Océan Indien (FBBOI), Varuna encourage et finance entre autresla création de chaînes de valeur durables, ou la promotion d’activités économiques responsables, comme dans les secteurs de l’écotourisme, de la pêche ou des produits issus de la biodiversité. L’objectif est que ces projets stimulent une économie locale durable, contribuent à créer des emplois verts et amliorent la résilience des territoires face aux défis environnementaux.
Ainsi, en promouvant un développement intégré où culture, économie et environnement s’enrichissent mutuellement, Varuna contribue à bâtir un avenir plus durable et solidaire pour toute la région du sud-ouest de l’océan Indien.
Dans les Pays et Territoires d’Outre-mer (PTOM), concilier protection de l’environnement marin et développement humain
Malgré la diversité des écosystèmes et des modèles économiques, les PTOM des Caraïbes, du Pacifique et des Terres Australes font face à un certain nombre de vulnérabilités et d’enjeux communs en termes de développement. Pour y répondre, ces pays et territoires insulaires ont mis en place divers efforts et instruments nationaux et régionaux destinés notamment à développer et à diversifier leurs économies, tout en augmentant leur résilience face aux changements climatiques.
Dans les Caraïbes, le programme RESEMBID a élaboré et mis en œuvre avec les PTOM de la zone un portefeuille de 17 projets de biodiversité marine pour une valeur de 8,5 millions d'euros dans 11 territoires insulaires.
En complément des actions de protection et restauration des zones marines protégées, récifs coralliens, mangroves, herbiers marins, les activités portent notamment sur la gestion d’une pêche durable via la surveillance, l’aide à la restauration et le suivi du commerce durable des espèces endémiques, la cartographie spatiale et la gestion intégrée des zones côtières, ou encore l’éducation à l'environnement via des programmes scolaires.
Depuis le démarrage du programme en 2019, plus de 15 000 bénéficiaires locaux ont été directement accompagnés par des projets axés sur la biodiversité marine à Anguilla, Aruba, Bonaire, Curaçao, aux îles Caïmans, aux îles Vierges Britanniques, aux îles Turques, à Sint Maarten et à Saint-Barthélémy
A Aruba, un documentaire a été réalisé autour du projet Turning the Tide. Ce projet, mis en œuvre par Wageningen University & Research, Aruba Conservation Foundation, l’Université d’Aruba et ScubbleBubble Foundation et financé par le programme RESEMBID, vise à restaurer un des écosystèmes marins sains et résilients. D’une durée d’une heure et demi et tourné en IMAX, le documentaire entend sensibiliser la communauté internationale à l’importance de la conservation de la biosphère marine et côtière des Caraïbes.
Le documentaire est accessible ici
Étendu à 24 pays et territoires d’Outre-mer européens et britanniques, le programme Green Overseas intervient dans les océans Atlantique, Indien, Pacifique, Arctique, Austral, ainsi que dans la mer des Caraïbes à la fois sur la transition énergétique, la résilience au changement climatique et l’accès à la finance climat. Cet accompagnement comprend notamment le développement de codes de construction plus résilients face aux effets du changement climatique, l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments, ainsi que la gestion durable des ressources naturelles. Le programme Green Overseas agit concrètement sur des enjeux tels que l'adaptation des infrastructures aux aléas climatiques extrêmes (ouragans, inondations), l'optimisation de la consommation énergétique, ou encore la résilience des systèmes alimentaires et hydriques. Dans la continuité des discussions engagées lors de la COP28, et notamment du side event consacré à l’Indice de Vulnérabilité Multidimensionnelle (MVI) comme levier d’accès aux financements climatiques, l’organisation du GOCFF (Green Overseas Climate Finance Forum) en octobre 2024 a renforcé le dialogue avec les PTOMs, permis d’identifier leurs besoins spécifiques et de co-construire des outils techniques et financiers adaptés à leurs réalités. L’enjeu principal de ces territoires est en effet de porter leur voix sur la scène internationale, un travail de fond mis à profit à l’occasion de cette édition 2025 de la Conférence des Nations Unies sur les Océans.