Mauritanie : «Investir dans la formation des sages-femmes pour réduire la mortalité maternelle et infantile »

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Mauritanie

En Mauritanie, les services de santé primaire, et en particulier les services de santé sexuelle, reproductive et materno-infantile restent limités. Sur financement de l’Agence française de développement (AFD), le projet Temeyouz vient renforcer l’accès aux services de base pour les populations, au niveau national et dans les régions fragiles de l’est du pays. Sous maîtrise d'ouvrage du ministère de la Santé de Mauritanie, Expertise France assure la coordination générale du projet Temeyouz. Dans cet entretien, M. Ahmedou Ould Armiyaou, directeur de l’École Nationale Supérieure des Sciences de la Santé (ENSSS) de Nouakchott, nous explique les enjeux en matière de formation des sages-femmes.

 

 

Entretien avec M. Ahmedou Ould Armiyaou, directeur de l’École Nationale Supérieure des Sciences de la Santé (ENSSS) de Nouakchott, sur l’appui à cette école dans le cadre du projet Temeyouz (financé par l’AFD et mis en œuvre par Expertise France) afin d’adapter la formation de sages-femmes aux besoins de santé et aux standards internationaux, et contribuer à l’amélioration de la santé maternelle et infantile en Mauritanie.

 

 

 

 

 

 

Pouvez-vous nous décrire le contexte et le rôle des sages-femmes dans la santé maternelle et infantile en Mauritanie ?

En Mauritanie, le système de santé fait face à des défis importants qui ont un impact majeur sur la santé des populations. Le taux de mortalité maternelle est très élevé, avec 454 décès pour 100 000 naissances vivantes en 2021, en grande partie à cause d’un accès limité aux soins de santé de qualité pendant la grossesse, l’accouchement et la période post-partum. Les populations rurales et les plus pauvres sont particulièrement touchées. À cela s’ajoutent les pratiques sociales et traditionnelles néfastes pour la santé des femmes, telles que les mutilations génitales féminines et les mariages précoces.

Dans ce contexte, les sages-femmes ont un rôle crucial à jouer dans la promotion de la santé maternelle et infantile. Elles assurent un suivi régulier des femmes enceintes, en détectant les complications obstétricales, fournissant des soins pendant l’accouchement et la période post-partum, ainsi que des conseils en matière de planification familiale. L’investissement dans la formation des sages-femmes est donc une priorité pour améliorer la santé des populations, notamment pour les femmes et les enfants qui sont les plus vulnérables.

 

 

Pouvez-vous nous expliquer la nature de l’appui proposé dans le cadre du projet Temeyouz ?

Le projet Temeyouz, financé par l’AFD et mis en œuvre par Expertise France et le ministère de la Santé, appuie l’ENSSS dans l’adaptation de la formation des sages-femmes aux besoins de santé nationaux et aux standards internationaux. Cette transformation nécessite une redéfinition du métier et de la formation des sages-femmes afin de proposer une réponse plus structurée au niveau national.

L’appui dont bénéficie L’ENSSS se concentre sur quatre axes de renforcement : la gouvernance, les ressources humaines pour améliorer le cadre de formation en renforçant les compétences des enseignants sages-femmes, la formation initiale pour proposer une formation qui réponde aux exigences nationales et internationales, et la formation continue pour développer les compétences des sages-femmes en activité et renforcer les capacités des structures sanitaires.

 

 

 

Comment l’expertise française contribue-t-elle à renforcer le cadre de la formation ?

L’expertise technique internationale, en particulier française, nous accompagne dans la transformation de notre programme de formation afin de répondre aux normes du nouveau référentiel de formation élaboré par le ministère de la Santé, mais également pour répondre aux critères de l’enseignement supérieur.

Nous avons signé des conventions de partenariat avec plusieurs écoles françaises, entre autres, notamment avec les écoles de sages-femmes d’Amiens et d’Angers, pour bénéficier de leur expertise en matière de formation de sages-femmes.

Ces partenariats favorisent les échanges entre les deux pays et permettent ainsi à nos enseignants de bénéficier de formations pointues, notamment en matière de pédagogie active avec un accent mis sur la simulation, ce qui permet de pratiquer les procédures et les interventions sur des mannequins avant de les appliquer sur des patients réels.

 

 

 

Comment se déroule la formation des sages-femmes à l’ENSSS et quelles sont les perspectives pour les sages-femmes ?

L’ENSSS est la seule école en Mauritanie à proposer une licence professionnelle en maïeutique sur trois ans, qui répond aux normes de l’enseignement supérieur en Mauritanie, de l’Organisation ouest-africaine de la santé (OOAS) et de la Confédération internationale des sages-femmes (ICM). Cette formation accréditée permet aux étudiants de poursuivre leurs études vers un master de sciences de la santé ou un doctorat.

Actuellement, entre les premières et les deuxièmes années, nous avons 140 étudiantes sages-femmes qui bénéficient du nouveau programme de formation initiale, élaboré par le ministère de la santé, avec l’appui du projet Temeyouz. Au terme de cette formation, les sages-femmes devront être capables de prendre en charge un accouchement normal de bout en bout.

Après leur formation, les sages-femmes sont réparties dans tous les établissements de santé de la Mauritanie par la direction des ressources humaines du ministère. Selon les contextes, leur rôle varie. Au niveau des centres de santé, elles s’occupent du planning familial, des consultations de base telles que la consultation prénatale, la vaccination, le suivi de la grossesse, le pronostic des accouchements et, selon le pronostic, la sage-femme réfère la femme au centre de référence le plus proche. Au niveau des hôpitaux, elles sont en charge des accouchements et des problèmes gynécologiques.

Quel est l’impact de la formation des sages-femmes sur la santé maternelle et infantile en Mauritanie ?

Investir dans la formation des sages-femmes est essentiel pour réduire la mortalité maternelle et infantile en Mauritanie. Grâce à leur formation, les sages-femmes peuvent fournir des soins de qualité pendant la grossesse, l’accouchement et la période post-partum, ainsi que pour gérer les complications obstétricales pendant la grossesse et après l’accouchement. Cela permet de détecter les problèmes rapidement et de prendre des mesures pour éviter des issues tragiques.

Cependant, pour mesurer l’impact de cette formation sur la santé publique, il est essentiel d’investir dans la pérennité de l’action, en garantissant un suivi à long terme de la formation, en formant plusieurs promotions de sages-femmes pour mesurer l’impact sur la mortalité maternelle et infantile.

 

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