5 ans après la création de la composante genre d’EUROsociAL, un bilan positif et un effet transformateur

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Amériques
Le 29 et le 30 juin dernier a eu lieu à Bruxelles l’évènement final d’EUROsociAL, programme de coopération de l'Union européenne pour la cohésion sociale en Amérique latine. Expertise France met en œuvre depuis 2016 la composante des politiques d’égalité de genre du programme. Bilan des progrès accomplis et perspectives.

Depuis 17 ans le programme EUROsociAL a contribué à la formulation et à la mise en œuvre de politiques publiques visant à renforcer la cohésion sociale et réduire les inégalités en Amérique Latine. Ce dernier est mis en œuvre par un consortium composé par la Fondation internationale et ibéro-américaine (FIIAPP) qui coordonne la composante Gouvernance démocratique, par Expertise France qui est en charge de la mise en œuvre de la composante de Politiques d’égalité de genre, ainsi que par l'Organisation internationale italo-latino-américaine (IILA), chargée de la composante Politiques sociales. Le consortium comprend également le Secrétariat centraméricain pour l'intégration sociale (SISCA), basé à Panama.

 

Le programme EUROsociAL+ est un outil performant et innovant pour améliorer les politiques publiques de cohésion sociale. Ce dernier a évolué au fil des années en adoptant une approche innovante pour mieux répondre aux besoins des pays bénéficiaires. Premièrement, c’est un programme tourné vers la demande, c’est-à-dire que les besoins des États sont écoutés, évalués et qu’une offre sur mesure est présentée pour que la réponse soit la plus pertinente et adaptée possible. Deuxièmement, il encourage la coopération horizontale et triangulaire à travers le partage de bonnes pratiques entre les administrations publiques des deux régions et l’établissement des liens entre pays pour promouvoir un apprentissage mutuel. Troisièmement, il s’agit d’un programme flexible qui s’adapte aux contextes des pays latino-américains. Quatrièmement, c’est un programme qui encourage les alliances régionales et bi-régionales et qui promeut les stratégies intersectorielles pour garantir des politiques publiques intégrales et durables. Enfin, il promeut la transversalisation du genre dans tous les projets et toutes les actions menés.  

 

En 2016, et pour sa troisième phase, le programme s’est doté d’une composante spécifique des politiques d’égalité de genre afin de réduire les inégalités entre les femmes et les hommes et favoriser les autonomies physique, socio-économique et politique des femmes. Le but est également d’intégrer et transversaliser la perspective de genre non seulement dans l’ensemble des actions, mais aussi au sein des autres composantes et des processus de travail.

 

Une centaine d’actions mises en œuvre depuis 2016

 

La première grande innovation du programme a été la création d’une composante spécifique de politiques d’égalité de genre qui reconnaît l’existence d’agendas et droits spécifiques pour les femmes et les filles.

Notre composante a travaillé constamment pour le renforcement des ministères des droits des femmes et de toutes les institutions œuvrant pour l’égalité de genre 

Ana Perez Camporeale, Coordinatrice de la composante des politiques d’égalité de genre, EUROsociAL

 

Le genre est une dimension essentielle pour la cohésion sociale. En 2016, la création d’une composante spécifique pour améliorer les politiques d’égalité de genre paraît comme une évidence. Cependant, lancer un dialogue sur les politiques publiques entre l'Europe et l'Amérique latine autour du genre, qui ne faisait pas partie des automatismes dans les discussions, a été un véritable défi.

L'intervention de la composante genre a pu contribuer aux agendas nationaux, régionaux et mondiaux et lier l'Europe et l'Amérique latine dans un véritable dialogue politique entre pairs. Elle a surtout contribué à légitimer les Mécanismes institutionnels de promotion des femmes latino-américains dans leur propre architecture institutionnelle, à renforcer leurs politiques mais également leur participation dans la mise en œuvre de politiques sectorielles.

 

Il est nécessaire d'influencer les politiques sectorielles à travers l’introduction d’unités spécialisées sur l’égalité de genre au sein des institutions publiques pour garantir la tranversalisation du genre. De plus, les alliances stratégiques sont très importantes. Celles-ci nous ont permis de travailler sur la budgétisation sensible au genre, notamment avec le soutien d’EUROsociAL 

Mayra Jiménez, Ministre des femmes, République Dominicaine

 

Depuis sa création, la composante des politiques d’égalité de genre a mis en place 113 actions et mobilisé plus de 170 experts/es dans 15 pays d’Amérique latine et 23 États membres de l’Union européenne.

 

Au niveau national, plusieurs résultats concrets peuvent être mis en avant. Nous pouvons mentionner, entre autres, l’évaluation de la norme d'égalité professionnelle au Mexique, la mise en œuvre d'un mécanisme de suivi de l'égalité salariale en Colombie, la co-construction des meilleurs systèmes de protection sociale dans plusieurs pays comme l'Argentine et le Costa Rica, le renforcement du cadre juridique des droits économiques des femmes en collaboration avec la Commission interaméricaine des femmes (CIM), mais également des mesures pour lutter contre les violences sexistes et l’amélioration des programmes de soutien aux victimes, par exemple, en Uruguay, au Paraguay, au Guatemala et en Équateur.

Au niveau régional, l'un des principaux résultats a été le renforcement des Mécanismes institutionnels de promotion des femmes afin de soutenir efficacement l'intégration de la dimension de genre et le développement de politiques publiques qui réduisent les inégalités. Grâce au travail axé sur la demande, des actions ont été menées pour améliorer les outils régionaux visant à réduire la violence sexiste, mais aussi à améliorer les systèmes de « care » dans une perspective de genre. La composante a pu travailler en étroite collaboration avec les institutions afin d'identifier les besoins pratiques et stratégiques des femmes, de proposer des mesures spécifiques et de guider et coordonner les réponses intersectorielles.

 

La valeur ajoutée du « Help desk genre »

Le Programme EUROsociAL+ a œuvré à ce que les femmes soient mieux incluses dans le développement et les bénéfices des politiques de cohésion sociale, c'est pourquoi le Help Desk de genre a été créé. Il s’agit d’une unité chargée de la transversalisation du genre au sein de l’ensemble des actions, des composantes et des processus de travail. 

 

Par la mise en place du Help Desk, la composante a dû adapter les processus, les habitudes et les méthodes de travail. A cet égard, elle a su créer des méthodologies durables qui permettent un dialogue sur les inégalités de genre tout en mesurant les progrès accomplis.

Avec cette unité, le programme a construit un cadre d'action commun entre les trois composantes, basé sur la logique des engagements politiques et opérationnels qui définissent l'égalité des chances et la réduction des inégalités de genre comme critère constitutif du programme. Aujourd’hui, le Help Desk est devenu un support de référence continu pour le personnel technique pour l'intégration de l'approche genre dans les actions, et a eu une véritable répercussion sur le dialogue avec les institutions. Il a, sans aucun doute, contribué à une amélioration qualitative des interventions du programme avec une plus grande intégration de la dimension de genre, et un élargissement du spectre des résultats des politiques publiques, à différents niveaux (nationaux, régionaux et même bi-régionaux).

 

Le Help Desk de genre a été un outil transformateur qui a permis d’induire un changement sur la situation des femmes. Nous avons essayé de fixer comme horizon non pas des standards minimums mais des maximums, en surmontant certaines résistances souvent ancrées dans la culture institutionnelle

Bénédicte Lucas, responsable du Help Desk genre

 

Les progrès accomplis grâce au travail de cette unité sont tangibles. En effet, de 63,5% des actions avec une perspective de genre (partielle ou intégrale) avant la création de l’unité, le programme est passé à une proportion aujourd’hui de 85%. Au total, ce sont 76% des actions de l’ensemble du programme qui ont une perspective de genre.

 

+EUROPA : une stratégie gagnante pour une forte mobilisation des pays de l’Union européenne

À travers la stratégie +Europe nous avons réussi à mobiliser 23 États membres de l’Union européenne et plus de 80 expert.e.s européen.ne.s. L'Union européenne a beaucoup à apprendre des expériences et des initiatives latino-américaines, et vice-versa. Faciliter les liens entre les deux continents a été une véritable fierté.

EUROsociAL+ a montré qu’ensemble nous pouvons avancer vers un monde plus inclusif, égalitaire et durable

Alfonso Martinez Saenz, Coordinateur adjoint de la composante des politiques d’égalité de genre, EUROsociAL

 

Un autre succès de la composante des politiques d’égalité de genre a été de conceptualiser et de mettre en œuvre la stratégie +Europe. À cet égard, nous avons travaillé avec plus de 23 États membres de l’Union européenne, à travers la mise en œuvre des activités telles que des séminaires, de l'assistance technique et des visites d'étude visant à promouvoir l'expertise des expert/e/s européen/ne/s en matière de genre ou encore à travers l’organisation d’évènements de haut niveau, comme « Deux continents Unis pour l’Égalité » qui a eu lieu le 4 mars 2021 dans le cadre de la présidence française du Conseil de l'Union européenne, et qui a réuni à Paris 12 ministres et représentants des Mécanismes institutionnels de promotion des femmes d'Europe et 13 d'Amérique latine pour renforcer le dialogue et l'échange de bonnes pratiques sur l'autonomie économique des femmes. Ces types d’événements ont une capacité d’incidence très forte dans les agendas et les feuilles de route des pays, tant au niveau national que régional. Ce sont des espaces essentiels de partenariats mais aussi d'identification des bonnes pratiques et des demandes des pays. Cela permet d’articuler les actions, les intérêts et les leçons tirées de celles-ci.

 

Une demande croissante et la nécessité de pérenniser les acquis en matière de genre en Amérique latine

Six ans après la création de la composante, il est aujourd’hui essentiel de pérenniser les acquis de la région en matière d’égalité de genre. Plus que jamais, il est nécessaire de comprendre qu’il est impossible de réduire les inégalités sans s’attaquer aux inégalités structurelles de genre.

Pour intégrer la dimension de genre, il n’est pas suffisant d’adopter des agendas spécifiques, il faut également assurer la transversalisation du genre. Cela permettra de construire un nouveau pacte social basé sur des accords politiques redistributifs qui favorisent un développement inclusif et durable pour toutes et tous, et dans lequel toutes les politiques sectorielles partent du principe que chaque politique publique a des effets différenciés sur les femmes et les hommes. De plus, il faut accroître l’attention portée à la diversité et aux droits humains avec une approche fondée sur le cycle de vie, de la naissance à la vieillesse.

 

Les besoins sont évidents dans la région. Les demandes se manifestent même dans cette phase finale du programme. Des processus à long terme et d'impact sont en train de s'ouvrir, en positionnant (un peu tard) les femmes au centre, et c'est cela qui est important : être protagonistes de notre histoire et de nos politiques 

Ana Perez Camporeale, Coordinatrice de la composante des politiques d’égalité de genre, EUROsociAL

 

Il faudrait continuer à renforcer l’architecture institutionnelle des Mécanismes institutionnels de promotion des femmes et formaliser les alliances stratégiques entre les pays latino-américains et les projets de l’Union européenne en matière d’égalité de genre tout autant que favoriser la complémentarité entre les projets menés par les agences de coopération des pays membres de l’Union européenne. 

Enfin, comme le programme EUROsociAL+ l’a démontré, il faut maintenir la capacité de répondre aux demandes en étant flexibles, en adaptant la réponse et en intégrant des nouveaux acteur/ice/s, ainsi que les différents niveaux administratifs et les gouvernements.

 

Pour en savoir plus sur le programme EUROsociAL

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